Source Journal du Design :

La série de meubles Reworked, de Linde Freya Tangelder, superpose matériaux, gestes et histoires pour créer un langage sensuel et protecteur, alliant abri et forme.

Cette collection, composée d’un banc et d’une chaise minimalistes, incarne un langage architectural précis tout en résistant à la froideur d’une simple logique structurelle. C’est dans cette tension, entre abri et douceur, que son œuvre prend tout son sens.

Le vocabulaire stylistique de Tangelder s’inspire d’un mélange de fragments de bâtiments, de techniques de construction et de matériaux superposés. Le banc Reworked illustre ce concept avec une ossature en aluminium brossé, à la fois rigide et réfléchissante, contrastant subtilement avec des coussins en coton laqués à la main.

Un pied en bronze blanc complète la composition, non seulement comme support, mais aussi comme un subtil changement de tonalité et de mémoire. L’interaction entre la surface, le poids et la température de ces éléments crée une sobriété sophistiquée et sculpturale.



Il en résulte une étude sur la manière dont la protection est rendue à différentes échelles. La série Reworked explore l’impulsion à superposer – de la peau à l’abri – sans succomber à une métaphore explicite. Elle construit plutôt une sorte d’architecture tactile, où chaque matériau non seulement remplit une fonction, mais évoque également un passé ancestral ou industriel. L’aluminium, avec sa clarté mécanique, s’inspire du langage des infrastructures. Le coton, peint et laqué à la main, introduit le langage vernaculaire du domestique.

L’un des gestes les plus convaincants de la série est la traduction par Tangelder de plans d’étage architecturaux en asymétries textiles. Il ne s’agit pas de références décoratives, mais plutôt d’un moyen d’abstraire la logique spatiale en formes intimes. L’effet s’apparente à celui d’un plan – une superposition de mémoire spatiale ancrée dans la surface. Ce faisant, l’œuvre remet en question les distinctions linéaires entre plan et objet, utilisateur et espace.

Le procédé de peinture à la main sur coton offre une douce réfutation du déterminisme épuré de la fabrication industrielle. Si les composants en aluminium suggèrent la « répétabilité », les éléments textiles insistent sur la singularité – le geste, le temps et le toucher. Ils rappellent qu’à l’ère de la reproduction infinie, l’aura du fait main n’est pas nostalgique, mais radicale.



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